Les mutations théologiques dues à la pandémie

Fellows Agness CHILENGA, infirmière de l’hôpital missionnaire de Mbereshi (UCZ, Zambie), lors de sa formation à l’hôpital de Kirinda (EPRw, Rwanda) © DR

Le colloque de la Cevaa a eu lieu le 4 mars en visioconférence et avait un thème très actuel : « La mission de l’Église et de la théologie dans l’espace public à l’heure des épidémies/pandémies ».

La Cevaa, Communauté d’Églises en mission (anciennement « Communauté évangélique d’action apostolique ») est une association qui regroupe trente-cinq Églises protestantes réparties en Afrique, Amérique latine, Europe, océan Indien et Pacifique. Elle veut promouvoir l’unité de l’Église et la mission, en respectant la pluralité des expressions de foi liée à la pluralité des contextes. Elle le fait en favorisant les échanges, l’animation et la formation biblique et théologique. Son secrétaire général est le pasteur béninois Célestin Kiki qui animait le colloque.

Des contraintes identiques

Les interventions de Julie Kandema, pasteure, vice-présidente de l’Église presbytérienne du Rwanda, puis de Godson Lawson, pasteur et sociologue, président de l’Église méthodiste du Congo, ont permis de découvrir que les Églises d’Afrique sont globalement confrontées aux mêmes contraintes que la nôtre. Chacun doit faire preuve d’imagination pour s’adapter, comme nous : installation de lavabos aux entrées des temples, cultes dédoublés, cultes en visio, utilisation des réseaux sociaux etc.

Des nouvelles technologies de l’information

Le pasteur et journaliste de Suisse romande, Michel Kocher, nous a ensuite donné quelques pistes pour réfléchir aux mutations profondes que les crises actuelles vont avoir sur nos théologies. Il a comparé la pandémie actuelle à celle de la grande peste noire du XIVe siècle. À l’époque, la réponse théologique dans un contexte de peur de la mort a été le développement du commerce des indulgences. Mais, en 1517, Luther l’a combattu en affirmant le salut par grâce. À la même époque, est apparue une technologie révolutionnaire : l’imprimerie. Et les réformateurs vont s’appuyer sur ce moyen pour diffuser largement le texte biblique, jusque-là réservé aux religieux savants. La théologie et la façon de penser l’Église en ont été transformées.
Pour Michel Kocher, notre situation est assez parallèle : une pandémie et des nouvelles technologies de l’information. Il est persuadé que notre théologie va évoluer, ainsi que notre façon de vivre l’Église. Cette évolution naîtra de nos nouvelles expérimentations et des relectures que nous en ferons. Nous formulerons la foi et nous la vivrons de façon nouvelle.

Une promesse pour chacun

Notre foi a des fondamentaux qui font particulièrement sens aujourd’hui. Par exemple, le concept de l’Alliance de Dieu basée non pas sur le nombre, seule façon d’exister pour les GAFA (Google, Apple, Facebook, Amazon), mais sur la parole de Dieu qui est une promesse pour chacun. La place de la communauté, le rapport au corps, le besoin de liens d’amour, l’espérance devant la mort sont des sujets où une parole de l’Église a de la pertinence aujourd’hui.
La crise de l’exil dans la Bible a transformé une foi juive centrée sur Jérusalem et le temple, en une compréhension que la terre est le sanctuaire de Dieu. L’alliance a été revisitée. En ces temps de pandémie, il nous faut reprendre à nouveau le travail biblique et théologique. Nous ne sommes qu’au début d’une mutation.
Le colloque s’est terminé dans la joie : celle d’avoir pu se réunir tous sans les limitations habituellement dues aux voyages, pas toujours simples dans certaines parties du globe.

Françoise Giffard, représentante de l’EPUdF et
La pasteure Claire Sixt Gateuille en charge des relations internationales

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