L’orgue chante sous les doigts de Suzanne

Suzanne Louys © Brigitte Billaud

À 97 ans, Suzanne Louys est l’organiste titulaire du temple de Niort. Rencontre avec cette fervente fidèle éprise de liberté.

Suzanne a découvert le protestantisme enfant. Un père protestant et une mère catholique l’ont conduite à l’école du dimanche. « C’était passionnant et j’y étais très heureuse ». Mais un jour, sa maman lui a annoncé : « Tu t’engages un peu trop, je préfère que tu n’y ailles plus ». Suzanne s’est alors réfugiée auprès de son piano. Ce n’est qu’à 23 ans, à l’occasion de son mariage avec un protestant, qu’elle a repris contact avec le protestantisme. C’était à Grenoble. En même temps, sa carrière d’avocate prenait fin.

Un lieu pour s’exprimer librement

Une dizaine d’années en Afrique pour suivre son époux l’amène sur les bancs de l’Église évangélique du Congo. Le protestantisme fait à nouveau partie de sa vie. De retour en France et six enfants, elle fréquente l’Église protestante de Montrouge et tient l’orgue de temps en temps « pour rendre service », dit-elle modestement.
C’est en 1981 que Suzanne arrive à Niort, premier prix d’orgue en poche. Depuis que l’Église a fait l’acquisition d’un nouvel orgue, un Allen électronique en 1991, elle joue quasiment tous les dimanches au culte. « Les enfants me disent que je joue bien du piano, confie-t-elle. Je souhaite que la musique leur fasse plaisir, et ils me le rendent bien. »
Dans le protestantisme et l’Église de Niort, elle y est heureuse. « L’Église est le seul lieu où l’on peut s’exprimer, dire ce que l’on pense librement sans avoir de reproche ».

Un silence impressionnant

Un jour, Suzanne a déclaré, après s’être rendu compte que les gens parlaient lorsqu’elle jouait son morceau d’entrée, qu’ils devaient se taire et écouter. « Depuis, le silence est impressionnant ». Mais pour la sortie, elle a renoncé et ne joue plus. « Ce qui est vraiment extraordinaire ici, c’est qu’on est libre de faire ce que l’on veut ».
À 97 ans, Suzanne cherche une personne pour la remplacer. « C’est compliqué, explique-t-elle. Actuellement, je forme une jeune femme, mais il faut du temps pour apprendre. Elle ne sera pas prête avant dix ans ».
De sa lointaine carrière d’avocate, Suzanne se souvient avoir accompagné deux personnes au poteau d’exécution, juste après la guerre où la vengeance faisait office de justice. « Heureusement, je ne fais pas de cauchemar la nuit ! ».

Une occupation à plein temps

Aujourd’hui, Suzanne avoue ne pas avoir le temps de lire les journaux. La préparation des morceaux et des chants l’occupe à plein temps. « Ma musique doit toucher les gens. Je ne veux pas offrir une musique d’ambiance ».
Covid ou pas, Suzanne reste fidèle à l’orgue. « Bien sûr, il y a moins de monde mais les gens sont très disciplinés ». Après le premier confinement, lorsque les cultes ont repris, toujours à cœur d’assumer sa mission, elle a insisté pour qu’on vienne la chercher et reprendre le jeu de l’orgue. Et c’est toujours avec autant de joie qu’elle s’installe chaque dimanche devant le bel orgue et divulgue son art avec passion.

Élisabeth Renaud,
Rédactrice Le Protestant de l’Ouest

Verso de Domenico Zipoli interprété par Suzanne Louys lors du culte du dimanche 20 février 2021 au temple de Niort.

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