Responsabilités chrétiennes dans la crise écologique : quelles solidarités nouvelles ?

Du 22 au 24 février, s’est tenu le colloque de l’Institut supérieur d’études œcuméniques (Iseo) à l’Institut catholique de Paris, en partenariat avec le réseau Église verte. Hélène Brochet-Toutiri y a assisté en visioconférence.

Pendant ces trois jours, il a été beaucoup question de conversion et de la légitimité de ce mot dans la compréhension de la crise écologique. Dès le début de ces journées, le message du patriarche orthodoxe Bartholomée 1er a placé l’engagement écologique comme une priorité œcuménique.

Un plafond de verre

Ce colloque, très œcuménique, a prouvé qu’au-delà des différences confessionnelles, les approches sur l’écologie étaient très convergentes. Ce qui était nouveau était l’accent mis sur la catéchèse et la nécessité de revoir la théologie de la Création, telle qu’elle avait été longtemps transmise. Et de nouveaux concepts ont été développés : écologie intégrale, écothéologie, écoféminisme.
Le philosophe Bruno Latour a défini la notion de « zones critiques » comme limites du monde habité par l’ensemble des vivants. Il a replacé la science et la cosmologie dans le discours théologique pour inverser l’approche écologique et théologique en partant de la « fin », de l’eschatologie plutôt que se restreindre à la Création.
Dans la problématique : et si nos Églises institutionnelles n’étaient pas meilleures que nos États ? Christophe Monnot, Université protestante de Strasbourg, a dénoncé le « plafond de verre » qu’elles opposent aux volontés de transformation en profondeur souvent exprimées par les croyants. Martin Kopp, Université protestante de Strasbourg, dans une intervention très pratique intitulée : « Moi, nous, vous : pistes concrètes pour une écologie intégrale » a dévoilé un optimisme réaliste.
L’insistance sur la spiritualité de la théologie orthodoxe, sur le refus du dualisme corps/âme dans une vision globale du monde vivant, et la « théologie des énergies » (faisant penser à la sylvothérapie, le bienfait par les arbres) alimentent le triptyque « penser globalement, agir localement et se convertir personnellement ».

Une lecture africaine

Les interventions de Catherine Chalier, philosophe juive, sur « une solidarité très ancienne » entre les humains et les autres créatures du monde, et de Patrice Rolin, théologien protestant, sur « la crise écologique comme crise spirituelle » ont apporté un regard sur l’exégèse, à la fois herméneutique biblique et philosophie. À partir des termes « bon » et « très bon » du 1er chapitre de la Genèse, Catherine Chalier a insisté sur la responsabilité, la vocation dit-elle, de l’humain d’assurer cette solidarité entre les vivants, et de la penser sur le temps long, comme une solidarité générationnelle. Patrice Rolin a, lui, replacé « au centre » la problématique de la limite à partir d’une étude de l’arbre de vie de la Genèse.
L’intervention d’un théologien burkinabé a déplacé nos regards vers une lecture africaine de l’écologie. Original et dérangeant ! Notre arrogance occidentale est bousculée.
Valérie Nicolet, professeure à l’Institut protestant de théologie, a développé l’éthique du care, du soin, qui, en portant une attention aux circonstances particulières, promeut une dimension relationnelle qui enclenche la notion de responsabilité par rapport à tous les habitants du monde (l’ensemble des vivants).

Et la suite ?

Au moment où notre Synode national va de nouveau travailler sur le sujet de l’écologie, ce colloque œcuménique a abordé sans faux-semblants des questions essentielles, dans une démarche certes académique, mais qui dans la diversité des interventions, a associé sans cesse théorie et pratique.
Les discussions riches en ateliers et les prières ouvrant chaque journée, tournées vers l’Amazonie, le Congo et la Polynésie, ont ponctué ces trois jours.
Quelle suite à nos débats synodaux de 2019 voulons-nous donner, et faire en sorte que nos recommandations ne restent pas vœux pieux ? Prouvons que le « plafond de verre » peut être cassé en région Ouest. 

Hélène Brochet-Toutiri

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