Commémorer ensemble la Réforme *

© Élisabeth Renaud

L’affichage par Luther, le 31 octobre 1517, de 95 thèses, a ouvert une époque qui se soldera, malgré lui, par l’éclatement de l’Église d’Occident. Les jubilés de cette date ont généralement provoqué chez les protestants des attitudes plus ou moins polémiques d’autosatisfaction et de justification, les catholiques faisant figure d’accusés de service. Les catholiques, quant à eux, n’étaient en rien disposés à célébrer un schisme dont ils considéraient les protestants seuls responsables.

Des dialogues œcuméniques entre communions chrétiennes mondiales ont fait évoluer cette situation. Décisif pour la relation avec l’Église catholique romaine fut la signature de la Déclaration commune à propos de la doctrine de la justification signée par les luthériens en 1999, les méthodistes en 2006 et qui le sera par l’ensemble des Églises réformées en juillet 2017. Elle affirme que les condamnations du XVIe siècle ne concernent plus les Églises actuelles et constate que les manières de chaque tradition, de dire le salut, sont différentes mais compatibles. En 2013 fut publié Du conflit à la communion, pour aider les Églises à préparer la commémoration en ce sens.
Le recul du temps, une meilleure connaissance des documents, et une relecture commune de l’histoire permettent de sortir des simplifications partisanes et anachroniques. Le XVIe siècle était en Europe le moment de l’irruption de la Renaissance et de l’humanisme. La Réforme fut la dimension religieuse de ce phénomène. Reprenons conscience que Luther, Zwingli, et Calvin sont les contemporains de Christophe Colomb et de Magellan, de Léonard de Vinci et de Michel-Ange, de Copernic et d’Érasme, sans oublier Ignace de Loyola et Thérèse d’Avila.
Le dialogue œcuménique travaille à reformuler les différences, pour qu’elles deviennent l’expression d’une légitime diversité. Ainsi seulement les Églises pourront se reconnaître comme étant des expressions authentiques de l’unique Église de Jésus-Christ.
Tous les chrétiens sont, par le baptême, nommés par Dieu et intégrés dans un seul corps, l’Église de Jésus-Christ. Du conflit à la communion propose de renforcer ce qui est commun, de s’engager à avancer étape par étape vers l’unité visible, de redécouvrir l’Évangile de Jésus-Christ pour notre époque et enfin, de témoigner ensemble de l’Évangile en se mettant au service du monde. Le pape François s’est personnellement associé à cette démarche en rendant grâce pour les percées spirituelles et théologiques de la Réforme lors d’une célébration commune à Lund (Suède) le 31 octobre 2016.
La commémoration de la Réforme dépasse la seule personne de Luther. Ce dernier appartient à l’histoire de toutes les Églises. Il a rappelé l’Église à sa mission, malgré les faiblesses dont il n’était pas exempt. « Vous êtes le sel de la terre » (Mt 5.13). Ce sel transmettra au monde la saveur qui donne sens à la vie, afin que la communauté humaine soit une source de joie, pour les humains comme pour Dieu.

André Birmelé
* Cet article fait partie du numéro spécial édité par Le Protestant de l’Ouest en 2017, à l’occasion des 500 ans de la Réforme.

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